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jeudi 19 novembre 2009

Refonte des Accords de Dayton : les discussions sur l'avenir de la Bosnie-Herzégovine


Une émission des Enjeux internationaux était consacrée mardi 17 novembre 2009 à la situation en Bosnie-Herzégovine (à écouter en ligne pendant 6 mois), à la veille du sommet de Butmir (du nom de la base militaire de l'ONU à Sarajevo) qui ouvre des discussions sur la refondation du statut et des institutions de la Bosnie-Herzégovine. L'invité, Thomas Schreiber (professeur associé aux Ecoles de Saint-Cyr Coëtquidan et spécialiste des pays de l'Europe de l'Est) a évoqué la situation particulièrement complexe de la Bosnie-Herzégovine, à la fois protectorat international et membre des Nations Unies (d'ailleurs, la Bosnie-Herzégovine a été élue, le 15 octobre 2009, pour faire partie des membres non permanents du Conseil de Sécurité en 2010-2011).

Si l'on parle souvent du Kosovo et du Timor oriental comme des exemples de protectorats internationaux (l'auto-proclamation de l'indépendance du Kosovo n'a, pour l'heure, pas été reconnue par suffisamment de membres des Nations Unies pour faire cesser la résolution 1244 des Nations Unies qui instaurait un protectorat international), il est plus inhabituel d'entendre parler de la Bosnie-Herzégovine comme d'un "protectorat", le terme soulignant l'organisation très particulière des institutions, qui met à mal le budget et le fonctionnement de l'Etat, et même son intégrité territoriale : en effet, le fonctionnement actuel de la Bosnie-Herzégovine, hérité des Accords de Dayton (voir le texte en anglais) signés le 14 décembre 1995, superpose les autorités et repose d'une part sur un découpage de la Bosnie-Herzégovine en 2 parties (la Fédération de Bosnie-Herzégovine et la Republika Srpska) réunies en une République de Bosnie-Herzégovine ; et d'autre part sur un protectorat "déguisé" qui chapeaute le tout.

Ainsi, l'Etat (la République de Bosnie-Herzégovine, qui représente la totalité du territoire) est divisé en deux entités politiques autonomes l'un de l'autre (Constitution propre, élus, plice, Armée, fonctionnaires distincts...). La République se retrouve au-dessus de ses deux entités et a obtenu un droit de regard sur les décisions de chacune dans certains secteurs, mais par exemple, la justice de la Fédération de Bosnie-Herzégovine (souvent appelée Fédération croato-bosniaque) ou de la Republika Srpska s'applique dans tous les cas sur leurs territoires, en priorité. De fait, il s'agit là d'un cas de fédéralisme qui laisse l'Etat fédéral avec peu de pouvoir de décision vis-à-vis des Etats fédérés.

S'ajoute, à ces difficultés, un autre problème de fonctionnement interne à la gestion de l'Etat central (la République de Bosnie-Herzégovine) : chaque poste de la haute administration doit être représenté par trois individus (un Bosniaque, un Croate, et un Serbe) qui alternent dans leur fonction. En découle un problème évident quant aux prises de décision, qui peuvent être très rapidement remise en cause par le prochain "occupant" dans ce jeu des chaises musicales. Un problème d'ordre budgétaire également, puisque pour un poste de haut-fonctionnaire, trois salaires sont nécessaires, ce qui pèse fortement sur l'ensemble du budget de la Bosnie-Herzégovine, qui doit parallèlement faire face à un effort de reconstruction (infrastructures, système scolaire, habitats...) dans un contexte économique d'après-guerre (difficultés amplifiées par la crise économique actuelle). Or, on sait le poids des difficultés économiques et des inégalité sociales dans le déclenchement des guerres, tout au moins dans la montée d'extrémismes (voir une autre émission des Enjeux internationaux, celle du 11 novembre 2009, avec Philippe Moreau-Desfarges pour invité, qui conclut sa présentation des "Guerres modernes" sur le poids des enjeux économiques et sociaux dans les tensions géopolitiques actuelles).

Enfin, dernière entité, celle de la communauté internationale, qui, dans une sorte de protectorat "caché" (puisque le terme n'est pas employé officiellement), a un droit de regard sur toutes décisions prises par les différentes entités politiques du pays, et peut les annuler, par le biais du Haut représentant des Nations Unies.

Les négociations actuelles sont le reflet d'une volonté de proposer un "Dayton II", c'est-à-dire qu'il s'agit de refonder entièrement le fonctionnement politique et juridique de la Bosnie-Herzégovine. Des négociations qui peinent fortement à trouver des solutions qui conviennent à tous les acteurs. Rappelons que les Accords de Dayton sont le fruit d'un compromis négocié pour mettre fin à la guerre, et reflètent en grande partie la division du pays en deux entités qui, pour le mieux, s'ignorent.


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