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jeudi 26 février 2009

Les risques de la reconstruction


A travers l'exemple de l'Irak, Stéphane Taillat souligne les liens entre la reconstruction, les tensions politiques, les enjeux électoraux et les défis économiques dans l'immédiat après-guerre (voir son billet "La rente pétrolière et la reconstruction : le péril qui vient" du 26 février 2009). La reconstruction est une urgence dans l'immédiat après-guerre : il s'agit avant tout pour les populations de survivre (avoir un toit, accès à l'eau potable, accès aux soins médicaux...) et pour les autorités de pouvoir rétablir un fonctionnement "normal" du pays et de retrouver leur souveraineté sur la totalité du territoire. Les risques autour de la question de la reconstruction sont nombreux, et la reconstruction en elle-même ne suffit pas :
  • une reconstruction qui tarde
    C'est le cas actuellement en Irak, comme le souligne Stéphane Taillat : "c’est la lenteur de la reconstruction qui a probablement contribué le plus à l’essor du soutien populaire à l’insurrection entre la fin de l’hiver et le printemps 2004". Les difficultés économiques et sociales s'inscrivent durablement dans les villes de l'immédiat après-guerre et repousser la reconstruction est un catalyseur de tensions entre les communautés identitaires, entre les groupes sociaux, entre les groupes politiques... Les retards en termes de reconstruction sont des facteurs de radicalisation plitique des populations les plus démunies.
  • une reconstruction inégale
    Le cas de la ville de Beyrouth est, à ce titre, particulièrement illustratif. La reconstruction a surimposé des discriminations dans l'espace urbain. En effet, la reconstruction a été le fruit, avant tout, d'investissements privés, qui se sont concentrés sur le centre-ville (partie Nord de la ville de Beyrouth). Les périphéries (partie Sud) ont été délaissées par ce mouvement de reconstruction. Et c'est là l'un des principaux facteurs explicatifs de la montée de l'influence des milices (et tout particulièrement du Hezbollah) dans les banlieues Sud de l'agglomération beyrouthine. A la ligne de fracture identitaire Est/Ouest, s'est ajoutée une ligne de fracture sociale Nord-Sud, particulièrement ancrée dans les tensions politiques (Voir notamment les travaux du géographe Eric Verdeil sur les différents enjeux de la reconstruction à Beyrouth).
  • une reconstruction mal ciblée
    On retrouve là l'exemple de l'ex-Yougoslavie, et notamment de la reconstruction des ponts de Mitrovica et de Mostar. Les 2 ponts ont été détruits respectivement pendant les guerres du Kosovo et de la Bosnie-Herzégovine. Si les 2 guerres sont différentes quant aux populations impliquées, à la situation d'avant-guerre, au déroulement des conflits et aux conséquences de ceux-ci, les 2 ponts ont été reconstruits comme des symboles de la réconciliation des populations dans les villes de Mitrovica et de Mostar. Force est de constater dans les 2 cas que les communautés restent chacune enfermée sur leur rive et que les ponts ne sont que peu traversés... Reconstruire le bâti ne suffit pas à effacer l'efficacité géographique de la guerre et à rétablir les pratiques spatiales d'avant-guerre(Voir notamment sur ce blog "Les frontières urbaines de l'ex-Yougoslavie : Mostar, Sarajevo, Mitrovica..." et "La notion d'urbicide : exemples en ex-Yougoslavie").

3 commentaires:

Tratnjek Bénédicte a dit…

Voir également à ce propos le billet de Frédéric Joli daté du 27 février 2009 sur "Gaza : sans paix durable, la reconstruction restera dans l'impasse" sur son blog L'humanitaire dans tous ses états.

http://cicr.blog.lemonde.fr/2009/02/27/gaza-sans-paix-durable-la-reconstruction-restera-dans-limpasse/

laterrebouge.fr a dit…

Merci pour ces 3 exemples évocateurs.
La reconstruction peut donc être également un facteur de guerre.

Il pourrait également être intéressant d'analyser la reconstruction non pas après-guerre mais pendant la période de guerre : les modalités d'organisation et de construction sont certainement bien différentes.

Tratnjek Bénédicte a dit…

C'est en effet un billet particulièrement court, qui n'avait pour objectif que de présenter des questionnements généraux.

Concernant la reconstruction pendant la guerre, l'ouvrage de Béatrice Boyer concernant la reconstruction dans les villes afghanes (et donc pendant le conflit lui-même) est particulièrement remarquable, parce qu'il pose des problématiques particulièrement prégnantes dans les enjeux de la reconstruction, mais aussi dans la gestion des temporalités (et l'idée de ne pas attendre la fin du conflit armé pour commencer le processus de pacification, y compris dans sa dimension urbanistique) dans ce qu'on appelle la "gestion de crise".

A mettre dans toutes les mains !
http://geographie-ville-en-guerre.blogspot.com/2011/11/villes-afghanes-defis-urbains-les.html